Quelque chose se détache du port

Alain Farah

Finaliste au prix Émile-Nelligan 2004


Les poèmes de Quelque chose se détache du port, loin de la limpidité douteuse du sens commun, fonctionnent sous l’impulsion d’une série de stratégies obliques, qui traversent l’expérience et la transforme selon divers axes: ceux de l’aphorisme autiste, d’une narration angulaire et minimale, de la spéculation et de l’inventaire. D’un lyrisme narquois, ils se lisent comme l’énonciation énigmatique d’un problème: de vie, de langage, de pensée.

L’écriture de Farah s’occupe de sens; de fait, elle en délivre, mais du sens irrésolu et rusé, effectif, qui oriente et désoriente à la fois, invite à jouer de la lecture. C’est dire que l’auteur pratique un art tendu, celui de l’esquive qui expose – par charges et recharges, touches et retouches - dans des phrases-traits où la légèreté de ton est l’habit de la précision. Ce langage calibré n’est pas celui de la quête de soi, mais le chant littéral dubitatif, étranger aux sirènes métaphysiques, d’une enquête sur ce que le soi absorbe. Sorte de traduction d’une langue par elle-même dans elle-même, de «translation» procédant par sauts qualitatifs, Quelque chose se détache du port est une circumnavigation en bassin de synthèse où des éléments biographiques, des allusions politiques ou historiques constituent le fond à traiter, d’où «se détachent» des poèmes. Trickster pudique et combatif, Farah adresse à l’époque une lettre de malaise carabiné – lettre dont il est le simple et timbré porteur.

QUATRIÈME DE COUVERTURE. – «La Quatrième Propagande me dit Àristide vends ton objet, alors magnanime je dégringole en sourates: ta piastre investit bien dans ma plaque! Mange ta laitue, lecteur! Tarabiscote ton derrière de livre avec ce siège abscons! Deux pouces levés, ça parle de pyramides! Moitié Alexandrin, moitié Phénicien, moitié Laurentien, je lis la Bible tous les soirs, vecteurs-fermiers, cheptels-ponction, je te complote une fable sur les tuyaux, un herbier qui ne recueille rien, l’histoire d’une table qui tourne mal, la Grand-mère des barbes, quittant Nasser en bateau elle perd ses lunettes chez Castro, ça pèse: Àl-gèbre! Àl-ambic! Àl-Alamein! Un abécédaire à rebours! L’arithmétique? pour me curer les dents! La poésie? pour cirer mes planchers! Alors Sidon récure, mais n’aie pas peur: mes carabiniers sont amicaux, lecteur.» – A.F.


«À la manière d’un Christophe Tarkos, Alain Farah se plaît à défendre une parole jubilatoire et chercheuse. Dans Quelque chose se détache du port, on entre en contact avec des bouts d’histoire familiale, du cabotinage théorique, une réflexion éparpillée, de même qu’un goût pour l’humour qui grince au bon endroit. Plus près du Paul-Marie Lapointe d’écRiturEs que d’un Claude Gauvreau, Farah s’amuse à dresser le constat d’un réel qui bouscule les codes et les normes. […] Quelque chose se détache du port révèle une voix des plus étonnante.»
David Cantin, Le Devoir

Autres éditions de ce livre

Poche

  • Écho Poésie, 2018, 88 p.
  • 10,8 × 17,8 cm
  • 9,95$
  • 7,00
  • 9782896983728